Les vessies-lanternes

Le président mexicain Andres Manuel Lopez Obrador a annoncé jeudi sa visite aux États-Unis. Le général William Barr a compris l’importance de la non-intervention dans la politique étrangère, mais rien n’indiquait publiquement que les deux nations avaient résolu de profondes divergences sur les plans de l’administration Trump de classer les cartels de la drogue mexicains parmi les organisations terroristes. La déclaration du président Trump à la fin du mois dernier selon laquelle Washington prévoyait de désigner les cartels comme des groupes terroristes étrangers a suscité une profonde opposition au Mexique, où beaucoup considèrent l’idée comme ouvrant la porte à une intervention directe des États-Unis – tout en ternissant l’image internationale du Mexique et en endommageant éventuellement le commerce et le tourisme. Dans un message Twitter, Lopez Obrador a décrit la session avec Barr comme une bonne réunion »et a signalé que le haut responsable américain de l’application des lois était au courant des sensibilités nationales sur la question. En tant qu’avocat, Barr comprend que notre constitution exige que nous adhérions aux principes de coopération pour le développement et de non-intervention en politique étrangère », a écrit Lopez Obrador, un gauchiste qui a recherché des relations cordiales avec la Maison Blanche de Trump. De cette façon, nous pourrons toujours travailler ensemble. » Publicité Dans un communiqué, le secrétariat aux affaires étrangères du Mexique a déclaré que les responsables des deux pays avaient engagé une conversation cordiale et respectueuse sur divers sujets liés à la sécurité, notamment le trafic d’armes, le blanchiment d’argent … et comment lutter contre la criminalité transnationale et le trafic international de drogues. Il n’y a eu aucun mot immédiat de la part des responsables américains sur la réunion, qui aurait duré 45 minutes et comprenait également d’autres responsables américains et mexicains de haut niveau, dont Marcelo Ebrard, le ministre des Affaires étrangères du Mexique, et Christopher Landau, ambassadeur de Washington à Mexico. La désignation prévue que Trump a révélée dans une interview à la radio est censée perturber le financement et d’autres aides pour les groupes cibles par le biais de sanctions. Son annonce est intervenue quelques semaines après que des hommes armés soupçonnés d’être liés à des trafiquants ont tué six femmes et trois enfants – citoyens doubles des États-Unis et du Mexique – dans une embuscade dans le nord du Mexique. Ces homicides et d’autres ont mis en évidence l’augmentation du taux d’homicides au Mexique, en grande partie lié au crime organisé, qui contrôle le trafic lucratif de drogues vers les États-Unis. S’ils étaient désignés, les gangs mexicains de la drogue rejoindraient des dizaines d’autres organisations internationales sur des listes noires similaires, y compris des factions islamistes, séparatistes et autres ayant des objectifs plus ouvertement politiques que les syndicats mexicains de la drogue – qui, bien qu’extrêmement violents, fonctionnent selon un principe à but lucratif. Publicité Les commentaires de Trump ont immédiatement fait fureur au Mexique, où l’histoire des interventions américaines passées – et de la perte d’une grande partie du territoire national du pays dans une guerre désastreuse du 19e siècle avec les États-Unis – est soulignée dans les textes scolaires standard. Coopération oui, intervention non », a été la réponse de Lopez Obrador au plan Trump. Lopez Obrador, qui a pris ses fonctions l’année dernière, a travaillé en étroite collaboration avec l’administration Trump sur un certain nombre de questions épineuses, notamment le commerce et l’immigration. Il a à plusieurs reprises félicité Trump et s’est éloigné de la confrontation directe avec le géant voisin du nord du Mexique et partenaire commercial clé. Beaucoup au Mexique craignent que la décision de Trump soit davantage liée au renforcement du soutien de sa base nationale lors des élections de l’année prochaine qu’aux efforts visant à endiguer la violence liée à la drogue au Mexique. Au cours de sa campagne présidentielle, Trump a été largement assailli pour avoir perçu le Mexique comme un dénigrement alors qu’il promettait de construire un mur le long de la frontière des deux nations, a qualifié les relations commerciales bilatérales d’injuste envers les États-Unis et a classé de nombreux immigrants mexicains aux États-Unis comme des criminels. On ne savait pas non plus exactement comment le Mexique bénéficierait de la désignation des cartels de la drogue comme groupes terroristes. Le Mexique coopère déjà avec la Drug Enforcement Administration et d’autres agences américaines d’application de la loi dans la lutte contre la drogue, et les autorités mexicaines soulignent que la plupart des drogues illicites se dirigent vers le marché américain vorace. Les États-Unis sont également à l’origine d’une grande partie des armes utilisées par les gangs de drogue mexicains. L’ancienne guerre du Mexique, fortement militarisée contre la drogue, est largement considérée comme un échec, et de nombreux experts estiment que des réformes institutionnelles telles que la fin de la corruption parmi les forces de police, les politiciens et le système judiciaire sont essentielles pour vaincre les cartels. Je n’accepte pas la terminologie du narco-terrorisme », a déclaré cette semaine à la presse Olga Sanchez Cordero, secrétaire à l’Intérieur du Mexique. Oui, nous avons le crime organisé, nous avons des cartels de la drogue, mais tous dans la catégorie de la criminalité, pas du narco-terrorisme. » Beaucoup au Mexique craignent également que la désignation puisse nuire au commerce international et au tourisme, piliers de l’économie mexicaine. Publicité De nombreuses entreprises américaines… ne voudront pas faire des affaires au Mexique de peur qu’il y ait une déclaration des États-Unis selon laquelle elles font affaire avec des gens du cartel », a déclaré la semaine dernière à Luis Luiso Ernesto Derbez, un ancien secrétaire aux Affaires étrangères.